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l'ancien matériel a une forte probabilité de ne pas correspondre aux savoirs
requis par les nouveaux équipements. Le travailleur risque de se trouver
déclassé, en ce sens que sa compétence dans le nouveau type d'emploi risque
d'avoir diminué...
Sans doute, le changement peut être l'occasion d'une formation nouvelle...
mais, il n'est pas toujours facile de s'adapter, en particulier quand pendant des
dizaines d'années on a effectué le même type de tâche. Tous ces éléments
permettent de comprendre pourquoi la modernisation suscite, à juste titre, des
inquiétudes pour l'emploi.
... à une approche plus globale
Le problème est pourtant plus complexe. Pour le percevoir, reprenons le
cas du travailleur ci-dessus. Supposons que l'entreprise dans laquelle il occupe
un emploi ne se modernise pas, alors que les entreprises étrangères le font...; la
compétitivité de la firme qui produit avec une technologie ancienne risque de se
dégrader, car les prix de revient unitaires des concurrents étrangers diminuent.
Ceux-ci risquent de pratiquer une guerre des prix... et si l'entreprise où travaille
notre salarié ne peut suivre, elle risque de se retrouver en faillite avec tous les
effets sur l'emploi qui en résultent.
Par ailleurs, un élément n'a pas été pris en compte dans l'analyse de notre
travailleur : la modernisation induit souvent des effets indirects dont certains
ont des effets positifs sur l'emploi global dans un pays. La baisse des prix liée à
l'accroissement de la productivité peut permettre aux ménages d'acheter plus de
biens, les commandes de biens d'équipement représentent une demande accrue
à d'autres entreprises qui peuvent être conduites à créer de nouveaux emplois...
Le solde sera-t-il positif? Ici les analyses divergent... et la réponse dépend du
contexte historique dans lequel on se situe.
3.5 Négociation et conflits
Si les problèmes d'emploi sont source de conflits, c'est que leur importance
est stratégique et que les intérêts des partenaires sociaux sont souvent opposés
en matière de répartition des revenus et de conditions de travail. Au cours des
deux derniers siècles, les relations du travail ont été marquées par la montée des
syndicats, qui sont des organisations destinées à défendre les droits
professionnels de leurs membres. La loi Le Chapelier avait interdit la cons-
titution de syndicats au nom du libéralisme. Les différents courants
interventionnistes insistèrent sur le caractère formel de l'égalité qui est sensée
en résulter entre employeur et employé; celui-ci face à la nécessité d'obtenir un
emploi pour survivre est conduit à accepter n'importe quelles conditions de
travail. La constitution de syndicats a eu pour première fonction d'améliorer le
pouvoir de négociation des travailleurs.
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